Pour les écologues, l'étude des amphibiens occupe une place indispensables en tant que moyen de mieux comprendre la dynamique et l’état des écosystèmes aquatiques comme terrestres, les continuités écologiques qui y sont associées et les enjeux naturels et règlementaires associés.
Dans cet article vous découvrirez l'importance de réaliser des inventaires des amphibiens et les méthodes de recherche et d’inventaire de ces animaux fascinants.
Un amphibien, qu’est-ce que c’est ?
Les amphibiens constituent une classe d'animaux vertébrés comprenant d’une part les grenouilles et les crapauds (qu’on appelle aussi les anoures) et d’autre part les salamandres et les tritons (aussi appelés urodèles). Ils se distinguent des autres vertébrés par un cycle de vie complexe, passant généralement par une phase aquatique larvaire (têtard ou larve) avant de se métamorphoser en une forme terrestre adulte. Beaucoup d'amphibiens utilisent des vocalisations pour communiquer, en particulier pendant la saison de reproduction. Les chants des anoures (les grenouilles et crapauds) sont souvent caractéristiques de chaque espèce et sont utilisés pour attirer les partenaires. Les amphibiens occupent une grande diversité d'habitats, allant des milieux aquatiques comme les étangs, les rivières et les marais aux milieux terrestres tels que les forêts, les prairies et les jardins. En France, on compte une trentaine d’espèces différentes.
Pourquoi inventorier les amphibiens ?
Parce qu’ils sont d’excellents indicateurs de la santés des écosystèmes.
Les amphibiens sont d'excellents indicateurs de la santé des écosystèmes en raison de leur sensibilité environnementale. Leur cycle de vie complexe, impliquant des phases aquatiques et terrestres, les rend dépendants de la qualité et de la perméabilité entre ces différents types habitats. En se reproduisant principalement dans les zones humides et avec un cycle de vie court, leurs populations réagissent rapidement aux perturbations environnementales et permettent de détecter les altérations de ces milieux particulièrement sensibles (pollution ,invasion biologique, pathogènes…). Aussi, caractériser les populations amphibiennes d’un site d’étude, c’est mieux comprendre les caractéristiques et l’état de santé d’un écosystème.
Parce qu’ils jouent un rôle dans le maintien des équilibres écologiques.
Leur présence dans une variété d'habitats et leurs interactions écologiques avec leurs habitats et les autres espèces font d'eux des contributeurs importants à la biodiversité locale. Les amphibiens occupent notamment des niveaux trophiques variés au sein de leurs écosystèmes, en fonction des espèces et de leur stade de vie, contribuant ainsi à la régulation des populations d'autres organismes (dont ils se nourrissent, ou qu’il nourrissent). On peut ainsi avoir des indices sur la diversité biologique d’un site en y étudiant les amphibiens.
Parce qu’ils présentent d’important enjeux de conservation, d’un point de vue patrimoniale et règlementaire.
De nombreuses espèces d'amphibiens font face à des menaces telles que la destruction ou l’altération de leur habitat, l’introduction d’espèces envahissantes et/ou de pathogènes ou encore les changements climatiques. Inventorier les populations d’amphibiens permet d'identifier la présence d’espèces protégées et/ou menacée et de réagir en conséquence pour éviter de leu porter atteinte, voire concevoir des stratégies de conservation ciblées.
Par ailleurs, l’inventaire des amphibiens répond également à une nécessité règlementaire. En effet, en France, toutes les espèces d’amphibiens sont protégées par la loi. Ainsi, la moindre atteinte d’un projet sur les populations d’amphibiens doit être précisément caractérisée afin de mettre en œuvre les mesures adéquates pour ne pas porter atteinte à l’état de conservation de ces populations.
Il est a noter que malgré ces mesures règlementaires, les dernières listes rouges nationales (2015) font état d’une tendance d’évolution au déclin pour 60% des amphibiens et que huit espèces d’amphibiens sur les 35 évaluées par cette liste sont menacées d’extinction sur le territoire métropolitain, soit une espèce sur cinq.
Comment inventorier les amphibiens ?
L’inventaire des amphibiens sur le terrain est une étape cruciale pour l’écologue afin de caractériser d’une part les espèces présentes, et d’autre part, les enjeux relatifs à ce groupe d’espèces. Pour cela, l’écologue peut compter sur une palette de méthodes scientifiques :
Prospections visuelles et auditives :
L'observation directe et l'écoute des amphibiens dans leur environnement naturel sont des méthodes fondamentales. Elles nécessitent une bonne connaissance du groupe pour identifier et différencier visuellement et auditivement (pour les anoures, c’est à dire les crapauds et les grenouilles, dont chaque espèce émet un son différent) les différentes espèces. Ces études visent à identifier les différentes espèces présentes, à suivre leurs comportements (se reproduisent-ils sur le site ? L’utilisent-ils pour se déplacer entre une zone de repos et une zone d’alimentation?) et à évaluer leur abondance. On réalise généralement ces prospections de nuit, au moment où les amphibiens sont actifs.
Capture :
Des méthodes de capture peuvent être utilisées utilisées pour étudier et inventorier plus en détail les amphibiens, c’est notamment le cas pour les larves et les têtards, qui peuvent être complexes à identifier à distance. On utilisera alors des techniques de capture au filet ou à la nasse pour pouvoir observer en détail les espèces, avant de les relâcher dans leur milieux. Attention, la capture et la manipulation des amphibiens est soumise à dérogation préfectorale, et les manipulations ne doivent être réalisées que lorsque cela est nécessaire pour éviter de déranger ces espèces sensibles.
Analyses ADN
Les analyses génétiques par ADN environnemental peuvent également offrir des informations précieuses sur la diversité des populations d'amphibiens d’un site, avec un coût terrain moindre car elles permettent d’avoir une analyse qualitative d’un milieu à partir d’un simple échantillon d’eau. Cela peut permettre par exemple de détecter des populations très réduites, des espèces difficiles à inventorier ou des débuts d’invasions biologique (Grenouille taureau par exemple).
Un groupe incontournable dans les études de biodiversité!
En conclusion, l'inventaire des amphibiens est bien plus qu'une simple collecte de données. C'est un outil incontournable dans l'évaluation des enjeux biologiques et règlementaires d'un site naturel et pour mieux comprendre l’état général d’un écosystèmes. Le groupe des amphibiens est ainsi incontournable lors d’un diagnostic ou un état des lieux de la biodiversité d’un site.
Référence
UICN France, MNHN & SHF (2015). La Liste rouge des espèces menacées en France - Chapitre Reptiles et Amphibiens de France métropolitaine. Paris, France.
Photographies :
Lissotriton helveticus, Bufo spinosus et Rana dalmatina - Amicie d'Augustin
Salamandra salamandre - Camille Pilisi